"LE ROI DANSE" - FILM - GERARD CORBIAU - 2000
Or Monsieur (Philippe d'Orléans, frère du roi) s'est entiché d'un meneur de troupe : Molière (Jean-Baptiste Poquelin). L'excellence ne pouvant régner que dans une seule maison, Monsieur l'apprenant à ses dépens, doit céder Molière et sa troupe au Roi, qui en fait la Comédie-Française en opposition aux Italiens de la commedia dell'arte.
Un trio se forme alors, l'un danse, l'autre compose et le dernier joue. Ils sont les pièces maîtresses des divertissements de cour : Le Roi rayonne, sublimé par les notes magiques et vibrantes de Lully, puis Molière triomphe de l'hypocrisie et de la monotonie par ses pièces de théâtre et son jeu d'acteur acerbe.
Âgé mais désireux cependant de continuer à rire,Louis XIV qui ne peut plus danser, ordonne désormais que Lully et Molière travaillent de concert à son divertissement ; ils montent ensembles des comédies-ballets avec l'aimable contribution de Corneille. Commence alors une prise de pouvoir progressive de Lully sur Molière après neuf ans de collaboration qui verront éclore neufs pièces et pour lesquelles Lully obtiendra du monarque repentant, l'exclusivité des droits d'auteurs.
Cependant que Molière reste l'artiste le plus adulé par le Roi, Lully jaloux et furieux, cherche à le faire discréditer aux yeux de tous, dénonçant le caractère burlesque de ce qu'il nomme des bouffonneries
et dont il refuse à présent de servir les pitreries avec d'honorables compositions musicales. Les singeries grotesques
de Molière sur scène, lui sont désormais une humiliation et une abomination incompatible avec sa passion qu'est l'art majeur de la création d'oeuvres lyriques.
Lully souhaite être l'unique vecteur élévateur d'âmes en perdition
, pour la plus grande gloire du Roi Soleil et voulant ainsi travailler à la grandeur de la monarchie de droit divin, dont l'unique représentant légal n'est autre pour lui, que Louis XIV.
Le film montre les débuts ainsi que les tribulations de trois âmes vouées à la perfection de leurs arts et dont l'achèvement tragique suspend le spectateur entre nostalgie et désirs d'accomplissements. Dans ce trio magnifique, magique et tragique, la corruption de l'âme par l'ambition de cour, vient pervertir des relations humaines préétablies et régies par des codes sociaux ancestraux d'une morale infranchissable. C'est dans le déclin d'une fin de règne laborieuse et fautes de soins médicaux appropriés, que s'achève ce récit palpitant, autant partisan que partial, livré par un personnage vieillissant : Jean-Baptiste Lully.
Précisions historiques : Lully meurt à l'âge de 55 ans des suites d'un accident avec sa canne, celle-là même lui servant à battre la mesure : elle lui transperça le pied, la gangrène qui s'empara de son membre inférieur fut à l'origine de la septicémie qui l'emporta – danseur, il avait refusé l'amputation qui eût pu le sauver.
Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière, laisse à la postérité entre autres, la pièce Les Précieuses ridicules qui le rendit célèbre, alors que Lully tomba peu à peu dans l'oubli collectif.
Molière demeure dans l'inconscient national, une figure incontournable du règne de Louis XIV. Il meurt le 17 février 1673, après la quatrième représentation du Malade imaginaire pour lequel il interprétait le rôle d'Argan.
Le Roi ordonna des funérailles, contrairement aux usages de l'époque qui voulaient que les comédiens ne fussent pas inhumés dans les sacrements de l'Église.